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Condamnation pour diffamation d’un directeur de publication, en raison d’une défaillance du service de modération

30 novembre 2015

A justifié sa décision une cour d’appel qui, pour condamner pour diffamation le directeur de la publication d’un site offrant un espace de contributions personnelles et la possibilité d’alerter en temps réel un service de modération, a retenu que le message litigieux n’avait pas été promptement retiré (Cass. Crim. 3 novembre 2015, n° 13-82645)

La Chambre Criminelle de la Cour de cassation a récemment précisé le champ d’application du dernier alinéa de l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 qui prévoit que : « Lorsque l’infraction [prévue par le chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse] résulte du contenu d’un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel, le directeur ou le codirecteur de publication ne peut pas voir sa responsabilité pénale engagée comme auteur principal s’il est établi qu’il n’avait pas effectivement connaissance du message avant sa mise en ligne ou si, dès le moment où il en a eu connaissance, il a agi promptement pour retirer ce message ».

En l’espèce, le 17 janvier 2010, un internaute publiait un commentaire sur le site lefigaro.fr à la suite d’un article intitulé « Les militants Modem pas opportunistes ». Le 19 janvier, le président départemental du Modem, jugeant ce commentaire en partie diffamatoire à son égard, en demandait la suppression en activant la fonction de modération proposée par le site. Le service de modération s’engageait à retirer le message le 20 janvier. Cependant, la suppression n’intervenait que le 8 février à 22h45, après une nouvelle réclamation, le 6 février. Le 6 avril, le président départemental du Modem portait plainte et se constituait partie civile pour diffamation publique envers un particulier et, à l’issue de l’information, le directeur de la publication du site lefigaro.fr fut renvoyé devant le tribunal correctionnel en qualité d’auteur principal de ce délit. La Cour d’appel confirmait le jugement de première instance qui avait condamné le prévenu, en considérant notamment :

  • d’une part, qu’en sa qualité de directeur de la publication d’un service de publication en ligne mettant à la disposition du public un espace de contributions personnelles mais également la possibilité d’alerter en temps réel un service de modération sur le contenu des messages déposés dans cet espace, le prévenu avait été mis en mesure, dès les alertes postées par le plaignant, d’exercer son devoir de surveillance sur le commentaire en cause qui n’avait pourtant pas été retiré promptement ;
  • d’autre part, que le prévenu ne pouvait utilement se prévaloir ni de ce que la fonction de modération aurait été externalisée ni du bénéfice des dispositions régissant la responsabilité pénale des hébergeurs (à savoir, l’article 6-I-3 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) concernant les hébergeurs (Modifié par Loi n°2014-873 du 4 août 2014 – art. 57)).

Saisie par le prévenu, la chambre criminelle rejette notamment le premier moyen par lequel le prévenu invoquait de nouveau l’externalisation du service de modération pour dire qu’il n’avait pas reçu notification personnelle des messages d’alerte et se plaignait de l’absence d’application à son égard des dispositions de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) concernant les hébergeurs. Sur ce point, la Cour de cassation estime en effet, que la cour d’appel a fait l’exacte application du dernier alinéa de l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 cité ci-dessus. Le prévenu a donc engagé sa responsabilité pénale dans la mesure où, alerté de la publication du message litigieux dès le 19 janvier, il ne l’a fait retirer que le 8 février.

Références : Cass. Crim. 3 novembre 2015, n° 13-82645

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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