L’action en requalification du contrat de bail « saisonnier » en bail commercial est soumise à la prescription biennale issue de l’article L. 145-60 du Code de commerce
Par deux actes intitulés chacun « bail saisonnier » en date du 26 janvier 2012 et du 28 janvier 2013, deux particuliers ont conclu des baux successifs portant sur un même local, d’abord pour une durée d’une année puis pour une durée de onze mois. À l’issue du second « bail saisonnier », les parties ont conclu un bail dit « précaire » portant toujours sur le même local à compter du 27 décembre 2013 et pour une durée de vingt-trois mois.
Alors que le bailleur exigeait du locataire qu’il libère les locaux loués à l’issue de ce bail « précaire », ce dernier l’a assigné, le 16 décembre 2015, afin de voir juger que le statut des baux commerciaux était applicable aux baux conclus depuis le 26 janvier 2012 et qu’il était, dès lors, titulaire d’un bail de neuf ans soumis à ce statut depuis le 27 décembre 2013.
Pour accueillir cette demande, la cour d’appel Aix-en-Provence, a considéré que les baux dits « saisonniers » étaient, en réalité, des baux dérogatoires, de sorte que le preneur, qui s’était maintenu dans les lieux au-delà de leur expiration, était titulaire d’un bail soumis au statut des baux commerciaux depuis le 27 décembre 2013 en application de l’alinéa 2 de l’article L. 145-5 du code de commerce.
Statuant sur le pourvoi formé par le bailleur, la troisième chambre civile de la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel au visa des articles L. 145-5 et L. 145-60 du code de commerce (dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi du 18 juin 2014) en considérant que l’action en requalification du bail « saisonnier » en bail commercial est soumise à la règle de la prescription biennale de sorte que l’assignation délivrée le 16 décembre 2015 était tardive et l’action prescrite.
Par cette décision, la Cour de cassation confirme une jurisprudence bien établie selon laquelle la prescription biennale s’applique à l’action qui tend à requalifier un contrat en bail commercial, le délai de prescription courant alors à compter de la conclusion du contrat (Cass. 3e civ., 23 novembre 2011, n° 10-24163 ; Cass. com., 11 juin 2013, n° 12-16103 ; Cass. 3e civ., 14 septembre 2017, 16-23.590) et affirme que l’action en requalification d’un bail sui generis en bail dérogatoire est soumis au même régime.
En revanche, et comme l’a rappelé la cour d’appel Aix-en-Provence dans cette affaire, l’action qui tend à faire constater l’existence d’un bail commercial né du maintien en possession du preneur à l’issue d’un bail dérogatoire, par l’effet de l’article L. 145-5 du Code de commerce, n’est pas soumise à la prescription biennale (Cass. 3e civ., 1er octobre 2014, n° 13- 16.806).
Cass. 3e civ., 17 septembre 2020, n° 19-18.435, à paraître au Bulletin