Méconnaissance de l’obligation de justifier le montant et le mode de calcul des droits d’entrée et des redevances dans la convention : absence de caractère illicite du contrat
Par un arrêt du 10 juillet 2020, le Conseil d’Etat précise que l’omission de faire figurer dans une convention de délégation de service public la justification des montants et modes de calcul des droits d’entrée et des redevances versées par le délégataire ne confère pas un caractère illicite au contrat et n’affecte pas les conditions dans lesquelles les deux parties ont donné leur consentement.
Dans cette affaire, la commune de La Guérinière a confié l’exploitation du camping municipal à la société Les Moulins pour une durée de quinze ans. Le contrat a été résilié aux torts exclusifs de la société. Cette dernière a alors saisi le tribunal administratif de Nantes afin qu’il constate la nullité de la convention en litige et condamne, sur le fondement de la responsabilité quasi-contractuelle, la commune de La Guérinière à lui verser une somme de 1 738 242,31 euros correspondant aux redevances dont elle s’est acquittée en application de la convention. Le tribunal administratif a, par jugement du 14 mars 2018, annulé la convention et condamné la commune à verser à la société Les Moulins la somme de 428 243,63 euros. La cour administrative d’appel de Nantes a, par un arrêt du 19 juillet 2019, rejeté les appels formés par la commune de La Guérinière et la société Les Moulins contre ce jugement.
Sur seconde saisine de la société Les Moulins, le tribunal administratif de Nantes a, par jugement du 23 mai 2018, condamné la commune à verser à la société la somme de 1 667 645 euros, sur le fondement de la responsabilité quasi-contractuelle, au titre des investissements qu’elle a réalisés sur le camping municipal avant la résiliation de la convention. La cour administrative d’appel de Nantes a, par un arrêt du 19 juillet 2019, rejeté l’appel formé par la commune de La Guérinière contre ce jugement, porté le montant de la condamnation à 2 001 174 euros et enjoint à la commune de La Guérinière de verser à la société Les Moulins la part non acquittée de cette condamnation. La commune se pourvoit en cassation contre cet arrêt.
À cette occasion, le Conseil d’Etat précise que l’absence de justification du montant ou du mode de calcul de cette redevance – conformément aux dispositions de l’article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales – ne confère pas un caractère illicite au contrat et n’affecte pas les conditions dans lesquelles les deux parties ont donné leur consentement ; une telle omission pouvant être régularisée. Partant, elle ne constitue pas un vice d’une particulière gravité justifiant l’inapplication de la convention au litige. Et dans la mesure où le contrat ne pouvait être écarté, la Cour ne pouvait condamner la commune au paiement de la somme de 2 001 174 euros sur le fondement de la responsabilité quasi-contractuelle.
La commune de La Guérinière est donc fondée à demander l’annulation des arrêts de la cour administrative d’appel de Nantes du 19 juillet 2019.
CE 10 juillet 2020, Commune de La Guérinière, req. n° 434353