Peine d’interdiction d’exercer un emploi public : l’autorité administrative est tenue d’en tirer les conséquences
Par un arrêt en date du 10 décembre 2020, le Conseil d’Etat a rappelé que l’autorité administrative était tenue de tirer les conséquences que doit emporter la condamnation pénale exécutoire d’un agent à une peine d’interdiction d’exercer un emploi public, et ce même en l’absence de disposition statutaire le prévoyant.
Dans cette affaire, le secrétaire général de la chambre des métiers de l’artisanat des Vosges a été jugé coupable par le Tribunal correctionnel d’Épinal des délits de détournement de fonds publics par une personne chargée d’une mission de service public et de prise illégale d’intérêt, et a ainsi été condamné à une peine d’emprisonnement de six mois assortie du sursis, au paiement d’une amende de 20 000 euros, et à la peine complémentaire d’interdiction d’exercer pendant une durée d’un an l’activité professionnelle ayant permis la commission de l’infraction.
Ce jugement étant assorti de l’exécution provisoire, le président de la chambre des métiers et de l’artisanat des Vosges a mis fin aux fonctions de l’agent et l’a radié des effectifs de la chambre et a rejeté la demande de l’agent tendant à obtenir sa réintégration à l’issue de la période d’interdiction. Si le tribunal administratif de Nancy a rejeté les demandes de l’agent radié, la cour administrative d’appel de Nancy a annulé ce jugement, et, par voie de conséquence, la décision du président de la chambre des métiers et de l’artisanat des Vosges précitée. Cette dernière s’est alors pourvue en cassation devant le Conseil d’État.
Le Conseil d’État a alors jugé que « l’autorité administrative est tenue de tirer les conséquences que doit emporter la condamnation pénale exécutoire d’un agent à une peine d’interdiction d’exercer un emploi public, même en l’absence de disposition de son statut prévoyant cette hypothèse », quand bien même il s’agirait d’une condamnation assortie d’une exécution provisoire. En effet, ainsi qu’il ressort des conclusions du rapporteur public sur cet arrêt, le Conseil d’État a déjà eu l’occasion de préciser (CE, 20 juin 2012, Simonpieri, req. n° 356865, publié au Recueil) que l’administration doit appliquer immédiatement les peines complémentaires, l’exécution provisoire « dérogeant nécessairement au principe selon lequel l’exécution des peines est subordonnée au caractère définitif de la décision ».
Par ailleurs, s’écartant des conclusions de son rapporteur public, la Haute juridiction a considéré que « compte tenu de sa condamnation pour détournement de fonds publics par une personne chargée d’une mission de service public et prise illégale d’intérêt et de la nature de l’emploi de secrétaire général de l’établissement public qu’il occupait, ne pouvait bénéficier d’une mesure de reclassement sur un autre emploi au sein de la chambre quand bien même il aurait été suspendu en vue de l’exercice de poursuites disciplinaires ».