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Précision sur les contours du réseau public d’assainissement

28 janvier 2018

Par une décision rendue le 12 janvier 2018, le Conseil d’État rappelle qu’une commune ne peut assujettir ses habitants à une redevance d’assainissement en l’absence de service public d’assainissement, lequel ne peut exister qu’à condition pour la commune de disposer d’un réseau public d’assainissement. L’occasion pour le Conseil d’État de revenir sur la notion de réseau d’assainissement et de distinguer réseau unitaire d’assainissement et simple réseau de collecte des eaux pluviales.

En l’espèce, par une délibération en date du 7 avril 2010, le conseil municipal de la commune de Sablonnières avait institué une redevance d’assainissement collectif. Deux habitants de la commune ont demandé au tribunal d’instance de Meaux d’annuler les titres exécutoires émis par cette dernière au titre de la redevance. Le juge judiciaire a sursis à statuer, posant une question préjudicielle en appréciation de la validité de la délibération du 7 avril 2010.

Le Conseil d’État rappelle tout d’abord les dispositions de l’article L. 2224-7 II du CGCT selon lesquelles « tout service assurant tout ou partie des missions définies à l’article L. 2224-8 est un service public d’assainissement », celles de l’article L. 2224-8 voulant que « I. – Les communes sont compétentes en matière d’assainissement des eaux usées. / II. Les communes assurent le contrôle des raccordements au réseau public de collecte, la collecte, le transport et l’épuration des eaux usées, ainsi que l’élimination des boues produites » et celles de l’article R. 2224-11 disposant que « les eaux entrant dans un système de collecte des eaux usées doivent, sauf dans le cas de situations inhabituelles, notamment de celles dues à de fortes pluies, être soumises à un traitement avant d’être rejetées dans le milieu naturel ».

Relevant ensuite que la délibération instaurant la redevance d’assainissement décidait également du lancement d’un appel d’offres pour engager la construction d’un réseau d’assainissement, le Conseil d’État en déduit qu’il n’existait ainsi pas un tel réseau à la date de délibération. Par ailleurs et surtout, le Conseil d’État apporte des précisions sur la notion de réseau unitaire d’assainissement (i.e. qui collecte les eaux pluviales et usées). Le Conseil d’État juge que « le réseau de collecte de la commune de Sablonnières constituait seulement un réseau de collecte d’eaux pluviales » et que la seule circonstance que « des eaux issues de systèmes d’assainissement non collectifs aient pu, par simple mesure de tolérance, être directement déversées dans le réseau de collecte de la commune de Sablonnières ne suffit pas à regarder celui-ci comme constituant un réseau unitaire, dès lors, notamment, que les eaux usées n’étaient soumises à aucun des traitements prévus par l’article R. 2224-11 du CGCT avant d’être rejetées dans le milieu naturel ».

À cet égard, il convient de rappeler la position du juge judiciaire sur cette question, rappelée dans un récent arrêt de la Cour de cassation (Cass. civ. 3e, 29 octobre 2015, req. n° 14-24.618, Publié au bulletin). Dans cette affaire, le demandeur estimait que la simple collecte des eaux usées par un réseau d’eaux pluviales ne pouvait recevoir la qualification de service public d’assainissement en l’absence de traitement des eaux usées par la collectivité. Pour autant, la Cour de cassation n’avait pas suivi l’argumentation du requérant, estimant au contraire que le réseau de la collectivité auquel était relié la propriété du demandeur était un réseau unitaire d’eaux pluviales et usées qui se déversait dans la rivière, relevant ainsi du service public d’assainissement peu important l’absence de raccordement à une station d’épuration.

Au cas présent, en l’absence de réseau d’assainissement, le Conseil d’Etat pouvait très logiquement déduire que les habitants de la commune ne pouvaient être regardés comme des usagers du service public de l’assainissement. Partant, la commune ne pouvait assujettir ces derniers au paiement d’une redevance d’assainissement.

CE, 12 janvier 2018, M et Mme B c/ Commune de Sablonnières, req. n° 404655

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