Précisions sur la répartition des compétences au sujet des actions en responsabilité en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique irrégulière
À titre liminaire, rappelons que la procédure d’expropriation comprend deux phases, la première est dite « administrative », dont l’élément phare est la déclaration d’utilité publique. La seconde phase est dite « judiciaire » et renvoie au transfert de propriété et à la fixation de l’indemnité d’expropriation.
Au cas d’espèce, un exproprié a demandé au juge administratif d’annuler la déclaration d’utilité publique à l’encontre de ses deux parcelles en vue d’étendre une ZAC, et le juge administratif a fait droit à ses conclusions. Consécutivement, l’exproprié a saisi le juge de l’expropriation, lequel a constaté la perte de base légale de l’ordonnance d’expropriation prise pour le transfert de propriété des parcelles et a ordonné leur restitution.
Lors du recours en responsabilité de l’exproprié contre l’État devant la juridiction administrative, celle-ci a relevé une difficulté de compétence auprès du Tribunal des conflits. En effet, l’article L. 223-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose qu’« (…) en cas d’annulation par une décision définitive du juge administratif de la déclaration d’utilité publique ou de l’arrêté de cessibilité, tout exproprié peut faire constater par le juge que l’ordonnance portant transfert de propriété est dépourvue de base légale et demander son annulation. / Après avoir constaté l’absence de base légale de l’ordonnance portant transfert de propriété, le juge statue sur les conséquences de son annulation. ». Aussi, il ressort de l’article R. 223-6 du même code que la réparation par le juge judiciaire peut avoir lieu par restitution ou, à défaut, par l’octroi de dommages et intérêts.
Ainsi, par une décision du 7 décembre 2020, le Tribunal des conflits a précisé qu’« il appartient au juge de l’expropriation, chargé de constater l’absence de base légale de l’ordonnance d’expropriation, de connaître des actions engagées par l’exproprié contre l’expropriant pour obtenir la réparation de tous les préjudices qui sont en lien avec le transfert irrégulier de propriété. » En revanche, « il appartient au juge administratif de connaître de l’action en responsabilité dirigée par l’exproprié contre l’État à raison de fautes qui ont été commises dans la phase administrative de la procédure d’expropriation et qui sont susceptibles de lui avoir directement causé un dommage indépendant de ceux qui trouvent leur origine dans le transfert irrégulier de propriété. ».