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Encadrement du pouvoir de gestion du domaine public des collectivités territoriales

03 mars 2017

Par sa décision Commune de Port-Vendres en date du 25 janvier 2017, le Conseil d’État apporte une limite à la liberté du gestionnaire du domaine public en jugeant qu’il doit tenir compte des principes de bon fonctionnement et de continuité du service public auquel le bien est affecté.

Le conseil municipal de la commune de Port-Vendres a adopté une délibération décidant de ne pas renouveler la convention de mise à disposition d’une maison dont elle est propriétaire à l’association départementale des pupilles de l’enseignement public des Pyrénées-Orientales (ADPEP 66).

Le Tribunal administratif, approuvé par la Cour administrative d’Appel, a fait droit au déféré préfectoral contre cette délibération en jugeant, en substance, que l’immeuble mis à disposition constituait une dépendance du domaine public ce qui imposait à son gestionnaire de s’assurer, lors du refus de renouvellement d’une convention d’occupation, que soit prise en considération la continuité des activités de service public qui y siègent.

Le Conseil d’État a dans un premier temps confirmé la requalification du contrat de location en convention d’occupation du domaine public en considérant, d’une part, que l’ADPEP participait au service public étatique de la protection judiciaire de la jeunesse, et, d’autre part, que l’immeuble avait été affecté au service public et spécialement aménagé à cette fin.

Il a ensuite rappelé le principe selon lequel les titulaires d’autorisations ou de conventions d’occupation temporaire du domaine public n’ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre (CE 19 janv. 1998, Mme Noblet, req. n° 58579, T. p. 895) ce qui n’est du reste qu’une conséquence logique de leur caractère précaire et révocable (Article L. 2122-3 du code général de la  propriété des personnes publiques). Toutefois, l’autorité gestionnaire ne dispose pas pour autant d’un pouvoir discrétionnaire pour refuser le renouvellement du titre et doit justifier d’un motif d’intérêt général : « le gestionnaire peut décider, sous le contrôle du juge, de rejeter une telle demande pour un motif d’intérêt général. Pour déterminer si un tel motif existe, il y a lieu, de tenir compte, le cas échéant, parmi l’ensemble des éléments d’appréciation, des contraintes particulières qui pèsent sur l’activité de l’occupant, notamment de celles qui peuvent résulter du principe de continuité du service public ».

Or, en l’espèce, en l’absence de projet alternatif d’intérêt général et alors que l’immeuble servait à l’exercice de sa mission de service public par l’ADPEP, le Conseil d’État a jugé qu’aucun motif d’intérêt général ne justifiait le refus de renouvellement de l’autorisation.

À cet égard, on pourra formuler deux observations.

D’une part, le Conseil d’État ne manque certes pas de relever que la commune a initialement approuvé l’affectation de cet immeuble au service public de la protection judiciaire de la jeunesse. Toutefois, une fois cette affectation acquise la continuité du service public doit peser dans la balance des intérêts à prendre en considération pour l’examen d’une demande de renouvellement d’occupation et ce, alors même que le service public en cause relève de la compétence de l’État. C’est donc in fine l’État qui peut faire valoir ses intérêts dans les choix de gestion opérés par les collectivités sur leur propre domaine.

D’autre part, cette jurisprudence rappelle que les prérogatives dont dispose le gestionnaire du domaine public ne lui sont accordées que dans le but d’une utilisation optimale du domaine public. À cet égard, on relèvera que la Cour administrative d’Appel de Paris a déjà condamné au regard des règles de la concurrence le refus de renouvellement d’une autorisation d’occupation privative du domaine public dès lors que ce refus n’était justifié par aucune considération d’intérêt général (CAA Paris 4 décembre 2003, Société d’équipement de Tahiti des Iles, req. n° 00PA02740). Partant, il est logique de sanctionner au regard du principe à valeur constitutionnel de continuité du service public un refus de renouvellement qui ne serait pas justifié par un motif d’intérêt général suffisant.

Références

CE 25 janvier 2017, Commune de Port-Vendres, req. n° 395314

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