Par une décision du 9 décembre 2016, le Conseil d’État admet l’indemnisation des préjudices subis par les proches d’une personne ayant contracté une maladie nosocomiale.
En l’espèce, un patient du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand avait contracté une maladie à la suite d’une hospitalisation intervenue en décembre 2010. Le tribunal administratif de Bordeaux, puis la cour administrative d’appel de Bordeaux, avaient condamné l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) à indemniser non seulement le patient infecté, à hauteur de 74 835,37 euros (somme fixée en appel), mais également sa femme à hauteur de 4 000 euros, ainsi que leurs trois enfants pour 2 000 euros.
Devant le Conseil d’État, l’ONIAM soulevait l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt de la cour administrative d’appel en ce qu’il le condamne à indemniser les proches de la victime. Le Conseil d’État confirme l’arrêt d’appel, rappelant à cette occasion que « les dispositions citées au point 3 de l’article L. 1142-1-1 du même code [de la santé publique] instituent un régime spécifique de prise en charge par la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales les plus graves qui a vocation à réparer l’ensemble de ces dommages, qu’ils aient été subis par les patients victimes de telles infections ou par leurs proches. »
Cette décision intervient au terme d’une année 2016 marquée par trois décisions relatives aux lois n° 2002-303 du 4 mars 2002 et n° 2002-1577 du 30 décembre 2002 définissant le régime d’indemnisation des maladies nosocomiales.
D’abord, par un arrêt du 28 septembre 2016, la Cour de Cassation avait indiqué que la responsabilité des professionnels et des établissements de santé reste engagée lorsqu’ils ont commis une faute, malgré le fait que l’infection entraine une atteinte à l’intégrité physique ou psychique supérieure à 25%. Dès lors la victime reste libre de mettre en jeu leur responsabilité et de ne pas saisir l’ONIAM (Civ. 1ère, 28 septembre 2016, n° 15-16.1117). On peut d’ailleurs s’interroger sur les conditions de conciliation de cette solution avec celle du Conseil d’État refusant de reconnaître un tel droit d’option à la victime (CE 21 mars 2011, Centre hospitalier de Saintes, req. n° 334501, au recueil Lebon).
Ensuite, la Cour de Cassation avait précisé que l’exercice d’un recours subrogatoire par l’ONIAM contre un professionnel ou un établissement de santé était subordonné à l’existence d’une faute de leur part (Civ. 1ère, 1er juin 2016, n°15-17.472).
La portée de ces deux arrêts des juridictions judiciaires doit s’apprécier au regard de la règle énoncée à l’article L. 1142-1-1 du code de la santé publique selon laquelle l’indemnisation des infections nosocomiales entrainant le décès du patient ou une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieure à 25% est indemnisable par la solidarité nationale.
Enfin, en début d’année 2016 le socle sur lequel repose le dispositif d’indemnisation des infections nosocomiales, à savoir la différence de traitement entre les professionnels de santé exerçant une médecine de ville, soumis à un régime de responsabilité pour faute, et les établissements de santé, dont la responsabilité est engagée de plein droit sauf preuve d’une cause étrangère, a été justifié par une différence de situation et, par suite, déclaré conforme à la Constitution (décision n° 2016-531 QPC du 1er avril 2016).
La décision du Conseil d’État du 9 décembre 2016 complète ce dispositif.
Références
CE 9 décembre 2016, ONIAM c. M. et Mme. A.B., req. n° 390892, à paraître au recueil Lebon.