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Injure publique envers un élu : refus de la Cour de Cassation de transmettre au Conseil Constitutionnel, une QPC relative à l’impossibilité d’invoquer l’excuse de provocation à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique

29 avril 2016

La Cour de cassation a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’impossibilité pour le prévenu poursuivi pour injure publique à l’égard des personnes visées aux articles 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881 d’invoquer l’excuse de provocation.

« L’impossibilité d’invoquer l’excuse de provocation en matière d’injures envers les personnes visées aux articles 30 et 31 de la loi sur la presse est-elle conforme au principe d’égalité devant la loi et à la libre communication des pensées et des opinions, respectivement garantis aux articles 6 et 11 de la Déclaration de 1789 ? ». Telle était la question prioritaire de constitutionnalité, posée le 14 septembre 2015 à la Cour de cassation en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel, et soulevée à l’occasion d’une procédure devant la Cour d’appel de Nancy (un humoriste ayant tenu des propos injurieux à l’égard d’une élue).

L’article 33, alinéa 2, de la loi sur la presse prévoit en effet que l’injure qui a été provoquée ne peut être sanctionnée. La provocation, qui doit répondre à certains critères pour être retenue, constitue une immunité spéciale conférée à l’auteur de propos injurieux. L’excuse est cependant réduite aux injures envers les particuliers et ne peut donc pas être invoquée en cas d’injure à l’encontre des autorités publiques désignées aux articles 30 et 31 de la même loi.

En l’espèce, la chambre criminelle estime qu’il n’y a pas lieu la renvoyer au Conseil constitutionnel la QPC évoquée, aux motifs que :

  • d’une part, la question n’est pas nouvelle ;
  • d’autre part, et surtout, elle ne présenterait pas de caractère sérieux.

La Cour de cassation estime ainsi que « le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations distinctes » et qu’en l’espèce la disposition « sanctionne sans disproportion manifeste, l’atteinte portée non seulement à la personne qui est visée par les propos incriminés, mais aussi à la fonction qu’elle incarne et tend ainsi à concilier la prévention des atteintes à l’ordre public, nécessaire à la sauvegarde de droits et principes de valeur constitutionnelle, et l’exercice des libertés constitutionnellement garanties, au nombre desquelles figure la liberté d’expression ». Elle ajoute enfin que, « pour qualifier de tels faits, il entre dans l’office du juge pénal de prendre en compte les circonstances dans lesquelles les propos incriminés ont été tenus et l’intention de leur auteur ».

Référence

Crim., QPC, 15 mars 2016, FS-P+B, n° 15-90.022

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