Un agriculteur avait acheté un produit, ayant causé un dommage, à une coopérative agricole qui l’avait elle-même acheté à une société venderesse. L’agriculteur avait engagé une action en responsabilité extracontractuelle sur le fondement de l’ancien article 1382, devenu 1240 du Code civil, à l’encontre de la société venderesse afin d’obtenir la réparation de son préjudice.
La Cour d’appel avait condamné la société venderesse du produit sur le fondement de l’ancien article 1382, devenu 1240 du Code civil, au motif que celle-ci avait failli à son obligation d’information et de renseignement en raison de l’insuffisance des mentions portées sur l’étiquetage et l’emballage du produit. La Cour d’appel avait pris le soin de relever que la victime n’invoquait pas le régime spécial de la responsabilité du fait des produits défectueux (issu de la Directive 85/ 374/ CEE du 25 juillet 1985 codifiée par les articles 1386-1 et suivants, devenus 1245 et suivants, du Code civil) car cette dernière pensait qu’il n’était pas applicable en l’espèce.
La Cour de cassation casse cet arrêt considérant que les faits étaient susceptibles de relever du régime spécial de la responsabilité du fait des produits défectueux et que, par conséquent, la Cour d’appel « était tenue d’examiner d’office l’applicabilité au litige de la responsabilité du fait des produits défectueux ». Elle précise que « si le juge n’a pas, sauf règles particulières, l’obligation de changer le fondement juridique des demandes, il est tenu, lorsque les faits dont il est saisi le justifient, de faire application des règles d’ordre public issues du droit de l’Union européenne, telle la responsabilité du fait des produits défectueux, même si le demandeur ne les a pas invoquées ».
Cette solution s’inscrit dans le prolongement de la jurisprudence selon laquelle le « régime de la responsabilité du fait des produits défectueux exclut l’application d’autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle de droit commun fondés sur le défaut d’un produit qui n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, à l’exception de la responsabilité pour faute et de la garantie des vices cachés » (Cass. com., 26 mai 2010, pourvoi n° 08-18.545, publié au bulletin ; Cass. 1ère civ., 17 mai 2016, pourvoi n° 13-18.876, publié au bulletin).
Cass. Mixte, 7 juillet 2017, pourvoi n° 15-25.651, publié au bulletin