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Répartition des compétences en matière d’hébergement d’urgence des familles

29 juillet 2016

Par cinq arrêts rendus le 13 juillet 2016, la section du contentieux du Conseil d’État précise la répartition des compétences en matière d’hébergement d’urgence des familles sans abri entre l’État et les départements tout en rappelant la compétence de principe de l’État.

Rappelons que le Conseil d’État avait clarifié cette répartition dans son arrêt Département de la Seine-Saint-Denis (CE, 30 mars 2016, Département de la Seine-Saint-Denis, req. n°382437). Il avait été ainsi jugé que la compétence de principe incombe à l’État sauf pour les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans mais que cette compétence de principe n’excluait pas l’intervention du département au titre de ses missions de protection de l’enfance « lorsque la santé des enfants, leur sécurité, leur entretien ou leur éducation l’exigent ».

Toutefois, quatre des cinq affaires soumises au Conseil d’État ont démontré que cette répartition des compétences devait être clarifiée. Celles-ci concernaient des familles avec enfants qui, déboutées de leur demande d’asile et sans abri, avaient saisi le juge du référé-liberté du tribunal administratif de Clermont-Ferrand pour demander soit au département, soit à l’État, soit aux deux, de leur apporter une aide. Dans trois cas, le juge avait enjoint au département d’apporter une aide financière à ces familles et, dans les deux autres, au préfet de leur fournir un hébergement.

Précisant sa décision du 30 mars 2016, le Conseil d’État a jugé que « dès lors que ne sont en cause ni des mineurs relevant d’une prise en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance en application de l’article L. 222-5 du [CASF], ni des femmes enceintes ou des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans mentionnées au 4° du même article, l’intervention du département ne revêt qu’un caractère supplétif, dans l’hypothèse où l’État n’aurait pas accompli les diligences qui lui reviennent, et ne saurait entraîner une quelconque obligation à la charge du département dans le cadre d’une procédure d’urgence qui a précisément pour objet de prescrire, à l’autorité principalement compétente, les diligences qui s’avéreraient nécessaires ».Par conséquent, le juge des référés ne peut prononcer de telles injonctions qu’à l’encontre de l’État.

En outre, dans les affaires où le juge avait enjoint au préfet de fournir un hébergement (n° 400074 et 399829), le Conseil d’État précise qu’il incombe « au juge des référés d’apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée ».

De plus, concernant les étrangers faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire ou dont la demande d’asile a été définitivement rejetée et qui n’ont « pas vocation à bénéficier du dispositif d’hébergement d’urgence », le Conseil d’État précise qu’ « une carence constitutive d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ne saurait être caractérisée, à l’issue de la période strictement nécessaire à la mise en œuvre de leur départ volontaire, qu’en cas de circonstances exceptionnelles ». Cette circonstance exceptionnelle peut être caractérisée notamment par « l’existence d’un risque grave pour la santé ou la sécurité d’enfants mineurs, dont l’intérêt supérieur doit être une considération primordiale dans les décisions les concernant ».

Enfin, si le juge des référés ne peut enjoindre à un département d’héberger les familles, il demeure qu’en application de la décision du 30 mars 2016 précitée, « un département ne peut légalement refuser à une famille avec enfants l’octroi ou le maintien d’une aide entrant dans le champ de ses compétences, que la situation des enfants rendrait nécessaire, au seul motif qu’il incombe en principe à l’État d’assurer leur hébergement ».

Références

CE Section, 13 juillet 2016, Département de la Seine-Saint-Denis, req. n° 388317

CE Section, 13 juillet 2016, Département du Puy-de-Dôme, req. n° 399836

CE Section, 13 juillet 2016, Département du Puy-de-Dôme, req. n° 399829

CE Section, 13 juillet 2016, Ministre des affaires sociales et de la santé, req. n° 400074

CE Section, 13 juillet 2016, Département du Puy-de-Dôme, req. n° 399834

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