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Suite de l’affaire Médiator : clarification des modalités d’engagement de la responsabilité de l’Etat au titre de la police des médicaments

01 décembre 2016

Par trois décisions du 9 novembre 2016 (req. n° 393108, n° 393902, n° 393904) faisant suite aux révélations sur la dangerosité du Médiator, le Conseil d’État précise les conditions d’engagement de la responsabilité de l’État au titre de son pouvoir de police sanitaire des médicaments.

Concrètement, plusieurs personnes ayant suivi un traitement au Médiator invoquaient la faute de l’État dans le cadre de sa mission de contrôle de mise sur le marché des médicaments, prévue à l’article L. 601 du code de la santé publique. Par des jugements du 7 août 2014, le Tribunal administratif de Paris avait déclaré l’État responsable des conséquences dommageables éventuelles liées à la prise du Médiator, à partir du 7 juillet 1999. Puis, par des arrêts de juillet 2015, la CAA de Paris avait confirmé ces jugements.

Les trois décisions rendues le 9 décembre 2016 clarifient plusieurs points.

Premièrement, la responsabilité de l’État au titre de son pouvoir de police sanitaire des médicaments peut être engagée pour faute simple. La caractérisation d’une faute lourde n’est donc pas exigée. En l’espèce, le Conseil d’État confirme l’appréciation de la Cour administrative d’appel retenant qu’en l’état des éléments connus sur le benfluorex (principe actif du Médiator) aucune faute ne peut être retenue contre l’État pour avoir autorisé la vente du Médiator de 1974 à 1999. En revanche, à compter de la révélation des effets néfastes du benfluorex au cours de l’année 1999, l’État aurait dû suspendre ou retirer l’autorisation de commercialisation. C’est donc de manière fautive que l’État a maintenu l’autorisation de commercialisation du Médiator après le 7 juillet 1999.

Deuxièmement, si l’État ne peut s’exonérer de l’obligation de réparer intégralement les préjudices trouvant directement leur cause dans cette faute en invoquant les fautes commises par des personnes publiques ou privées avec lesquelles il collabore étroitement dans le cadre de la mise en œuvre d’un service public, il n’en va pas de même lorsqu’il invoque la faute d’une personne privée qui est seulement soumise à son contrôle, ou à celui d’une autorité agissant en son nom. En l’espèce, la Cour administrative d’appel de Paris a donc commis une erreur de droit en jugeant que les agissements fautifs du laboratoire Servier ne pouvaient avoir pour effet d’exonérer l’État de tout ou partie de l’obligation de réparer les dommages liés à la prise du Médiator.

Troisièmement, le Conseil d’État admet pour la première fois l’indemnisation du préjudice moral lié à l’anxiété de développer une maladie grave, alors même que la victime ne présente aucune contamination avérée. L’indemnisation d’un tel préjudice suppose toutefois que soit prouvé son caractère direct et certain, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Références

CE 9 novembre 2016, Mme B…A…, req. n° 393108

CE 9 novembre 2016, Mme B…A…, req. n° 393902

CE 9 novembre 2016, Mme B…A…, req. n° 393904

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