Lorsqu’un candidat a accompli toutes les diligences raisonnables pour transmettre son offre dans les délais — en procédant à plusieurs tentatives suffisamment en amont de l’échéance et en utilisant un matériel informatique fonctionnel — mais se trouve empêché par un dysfonctionnement ou une contrainte technique de la plateforme, dont il ne pouvait avoir connaissance (telle qu’une limitation de la taille des fichiers), son offre ne saurait être écartée comme tardive.
Dans le cadre d’un appel d’offres ouvert pour la passation d’un accord-cadre à bons de commande pour la fourniture de dispositifs médicaux, l’AP-HP a écarté l’offre d’une société au motif que celle-ci avait été déposée après l’heure limite et avait été transmise via un lien de téléchargement externe non prévu par le règlement de la consultation du marché.
Le juge des référés du tribunal administratif de Paris a ordonné à l’AP-HP de reprendre la procédure au stade de l’analyse des offres en intégrant l’offre de la société requérante, au motif que cette dernière devait être regardée comme ayant accompli en temps utile les diligences normales attendues pour le téléchargement de son offre.
Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat confirme cette solution.
Après avoir rappelé les règles en la matière, prévues à l’article R. 2151-5 du code de la commande publique, et le principe selon lequel les offres reçues hors délai sont éliminées, la Haute juridiction vient tempérer cette affirmation en considérant que « l’acheteur public ne saurait toutefois rejeter une offre remise par voie électronique comme tardive lorsque le soumissionnaire, qui n’a pu déposer celle-ci dans le délai sur le réseau informatique mentionné à l’article R. 2132-9 du même code, établit, d’une part, qu’il a accompli en temps utile les diligences normales attendues d’un candidat pour le téléchargement de son offre et, d’autre part, que le fonctionnement de son équipement informatique était normal » (voir également CE, 23 septembre 2021, RATP, req. n° 449250).
Au cas présent, l’impossibilité de télétransmettre son offre sur la plateforme PLACE à laquelle s’était heurtée la société évincée n’était due qu’à la taille des fichiers qui la composaient, qui excédait le maximum fixé par la plateforme mais dont les candidats n’avaient pas été informés.
En essayant à deux reprises d’envoyer son offre sur le profil d’acheteurs, puis en la transmettant ensuite via un lien de téléchargement, le Conseil d’Etat a considéré que la société avait effectué en temps utile les diligences normales attendues d’un candidat pour le téléchargement de son offre.
Conseil d’Etat, 13 novembre 2025, Société Orthopédie Biomeca Locomotion, req. n° 506640