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Appréciation de l’intérêt agir contre un permis de construire : nécessité de démontrer en quoi le projet portera directement atteinte au requérant

29 février 2016

Par une décision du 10 février 2016, le Conseil d’État précise comment l’auteur d’un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager doit justifier de son intérêt agir.

Dans cette affaire, deux couples avaient demandé au Tribunal administratif de Marseille d’annuler le permis de construire accordé par le maire de Marseille à la SAS Sifer Promotion pour la réalisation d’un immeuble de deux étages et dix-huit logements sur un terrain situé à proximité immédiate de leurs maisons, ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux.

Le Tribunal avait rejeté leur requête par ordonnance, au motif d’une irrecevabilité manifeste. Saisi d’un pourvoi contre cette ordonnance transmis par la présidente de la Cour administrative d’appel de Marseille en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, le Conseil d’État profite de ce litige pour éclairer les modalités d’application de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme.

Rappelons qu’aux termes de ce texte, issu de l’ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013, « Une personne autre que l’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager que si la construction, l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation ».

S’agissant des modalités d’appréciation de l’intérêt à agir du requérant, le Conseil d’État rappelle tout d’abord qu’il lui revient « de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien » (CE, 10 juin 2015, M. D. et Mme A., req. n° 386121, publié au Recueil). Puis ils précisent « que les écritures et les documents produits par l’auteur du recours doivent faire apparaître clairement en quoi les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien sont susceptibles d’être directement affectées par le projet litigieux ».

Pour ce faire, il ne suffit pas aux requérants, comme ils l’ont fait en l’espèce, de se prévaloir de la qualité de propriétaire de biens immobiliers voisins directs de la parcelle destinée à recevoir les constructions litigieuses. Il leur revient d’apporter les précisions nécessaires à l’appréciation de l’atteinte directe portée par le projet litigieux à leurs conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de leurs biens, comme le Tribunal les avait d’ailleurs invités à le faire. Or, les deux couples ont seulement indiqué qu’une de leurs parcelles est mitoyenne et l’autre en co-visibilité du projet de la SAS Sifer Promotion et que la façade sud du projet, fortement vitrée, « créera des vues ».

Au regard de ces éléments, le Conseil d’État estime que le Tribunal administratif de Marseille a procédé à une exacte qualification juridique des faits en jugeant que les requérants étaient dépourvus d’intérêt à agir contre le permis de construire litigieux et qu’elle pouvait dès lors rejeter leur demande comme manifestement irrecevable par ordonnance, sans audience publique, sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative. Le pourvoi est donc rejeté.

Références :

CE 10 février 2016, M. et Mme C. et autres, req. n° 387507, sera mentionné aux Tables

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