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Congé-maladie et abandon de poste

29 décembre 2015

Dans une fonction publique largement protectrice des droits des fonctionnaires, le régime de l’abandon de poste demeure un îlot isolé permettant à l’administration de révoquer un agent sans lui communiquer son dossier ni suivre de procédure contradictoire. Toutefois, eu égard à la rigueur de cette procédure, la jurisprudence se montre en principe exigeante sur les conditions que doit respecter l’administration qui met en œuvre cette procédure.

Le Conseil d’État considérait notamment que le seul fait de se soustraire à une contre-visite n’était pas constitutif d’un abandon de poste (CE, 18 octobre 1978, Casanova, req. n° 96185 ; CE, 12 avril 1995, Office national des forêts, n° 151517). La Haute juridiction faisait en effet prévaloir la position régulière de congé maladie, en considérant notamment que la mise en demeure – préalable obligatoire à la radiation des cadres – ne pouvait être adressée au fonctionnaire qu’à condition que ce dernier soit en position irrégulière (CE, 21 janvier 1994, Mathion, req. n° 115810 ; CE, 10 janvier 2000, Boualaoui, req. n° 197591, Concl. J-H. Stahl).

C’est précisément sur ces solutions que le Conseil d’État a entendu revenir, par un arrêt du 11 décembre 2015, en jugeant qu’un fonctionnaire, pourtant placé en congé maladie, peut être radié des cadres après mise en demeure, dès lors qu’il s’est soustrait à une contre-visite médicale.

Plus précisément, après avoir rappelé le principe énoncé ci-dessus, selon lequel l’administration ne peut en principe adresser une lettre de mise en demeure à la suite de laquelle elle serait susceptible de procéder au licenciement de l’agent pour abandon de poste, à une date à laquelle l’agent est en position de congé de maladie, le Conseil d’État vient le tempérer en ajoutant que « toutefois, si l’autorité compétente constate qu’un agent en congé de maladie s’est soustrait, sans justification, à une contre-visite qu’elle a demandée en application des dispositions de l’article 15 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l’application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l’organisation des comités médicaux, aux conditions d’aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, elle peut lui adresser une lettre de mise en demeure, respectant les exigences définies au point 2 ci-dessus et précisant en outre explicitement que, en raison de son refus de se soumettre, sans justification, à la contre-visite à laquelle il était convoqué, l’agent court le risque d’une radiation alors même qu’à la date de notification de la lettre il bénéficie d’un congé de maladie ; que si, dans le délai fixé par la mise en demeure, l’agent ne justifie pas son absence à la contre-visite à laquelle il était convoqué, n’informe l’administration d’aucune intention et ne se présente pas à elle, sans justifier, par des raisons d’ordre médical ou matériel, son refus de reprendre son poste, et si, par ailleurs, aucune circonstance particulière, liée notamment à la nature de la maladie pour laquelle il a obtenu un congé, ne peut expliquer son abstention, l’autorité compétente est en droit d’estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l’intéressé ».

Si le respect des conditions auxquelles doit répondre la mise en demeure est ainsi solennellement rappelé par la Haute juridiction, il n’en demeure pas moins que cet arrêt appréhende l’abandon de poste avec plus de fermeté pour l’agent en congé de maladie.

Références :

CE, 11 décembre 2015, Commune de Breteuil-sur-Iton, req. n° 375736, sera publié au Recueil Lebon

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