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Conséquences indemnitaires d’un refus illégal d’avancement

29 avril 2016

Par un arrêt du 25 mars 2016, le Conseil d’État précise les conséquences indemnitaires d’un refus illégal d’avancement. En l’espèce, Madame A, professeur à l’école supérieure de physique et de chimie industrielle de la ville de Paris (« ESPCI ») avait, pendant quatre années de suite, présenté sa candidature à la promotion au grade de professeur de classe exceptionnelle, sans succès. Elle a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d’une requête tendant au versement d’une indemnité de 250 000€ en réparation du préjudice subi du fait des refus illégaux qui lui ont été opposés. Sa demande a été rejetée en première instance et en appel. Procédant à un raisonnement en deux temps, le Conseil d’État a cependant fait droit au pourvoi formé par Madame A.

Le Conseil d’État a tout d’abord réaffirmé le principe fondamental reconnu par les lois de la République d’indépendance des enseignants chercheurs (Cons. Const., 6 août 2010, M. Jean C., req. n° 2010-20/21 QPC ; CE, 15 décembre 2010, Syndicat national de l’enseignement supérieur et autres, req. n° 316927), « qui impose notamment, sous la seule réserve des prérogatives inhérentes à l’autorité investie du pouvoir de nomination, que, dans le cadre du déroulement de leur carrière, l’appréciation portée sur la qualité scientifique des travaux de ces enseignants ne puisse émaner que d’organismes où les intéressés disposent d’une représentation propre et authentique impliquant qu’ils ne puissent être jugés que par leurs pairs » (voir également : CE, 22 mars 2000, Ménard, req. n° 195639). Or, en l’espèce, la procédure d’avancement au grade de professeur de classe exceptionnelle prévue par les textes régissant l’ESPCI prévoyaient l’intervention du Conseil d’administration de l’Ecole et de la commission administrative paritaire qui, ni l’un ni l’autre, n’étaient exclusivement composés de professeurs de l’enseignement supérieur.

Mais le principal intérêt de cet arrêt réside dans la limitation de l’applicabilité de la jurisprudence Carliez (CE, Sect., 19 juin 1981, req. n° 20619), dont il résulte en principe que la faute – résultant du refus opposé à l’intéressé au terme d’une procédure irrégulière – ne peut donner lieu à réparation que s’il est établi qu’un tel refus n’aurait pas été opposé si une procédure régulière avait été suivie. En effet, en parallèle de cette solution, le Conseil d’État, dans un certain nombre d’hypothèses, a reconnu un droit à indemnité à l’intéressé lorsque celui-ci était en mesure d’établir qu’il disposait d’une chance sérieuse (par exemple : CE, 25 novembre 1998, Mme Josette X…, req. n° 181664 ; CE, 8 avril 2013, Brenne, req. n° 334581 : à propos du refus d’admission en troisième année du cursus de l’école supérieure d’informatique et applications de Lorraine à la suite d’une session d’examen). C’est dans ce sillon et contrairement au raisonnement retenu par la Cour administrative d’appel que le Conseil d’État a considéré que lorsque le refus d’avancement d’un professeur de l’enseignement supérieur est entaché d’une illégalité, résultant de l’irrégularité de la composition des organes chargés de sélectionner les candidats, le droit à indemnité du candidat ne peut être écarté que s’il est établi que l’intéressé ne disposait pas d’une chance sérieuse d’accéder au grade demandé.

Référence

CE 25 mars 2016, Madame A…, req. n° 386199, sera mentionné aux Tables du Recueil Lebon

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