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L’absence de décompte général et définitif ne fait pas obstacle à la forclusion d’une demande portant sur un différend en cours d’exécution

22 novembre 2023

Le Conseil d’Etat rappelle que le délai de forclusion de 6 mois prévu par le CCAG-Travaux de 1976 court à compter de la notification d’une décision expresse du maître d’ouvrage rejetant un mémoire en réclamation, et ce même en l’absence de décompte général et définitif qui sera notifié postérieurement à cette décision de refus.

Pour rappel, à la suite de la réception par le maître d’ouvrage d’un mémoire en réclamation portant sur un différend adressé par l’entrepreneur sur le fondement de l’article 50.22 du CCAG-Travaux de 1976, plusieurs délais commencent à courir. L’article 50.31 du CCAG prévoit d’abord que l’entreprise peut porter devant le juge la décision implicite de refus du maître d’ouvrage si, dans un délai de trois mois après la réception du mémoire en réclamation, aucune décision ne lui a été notifiée. L’article 50.32 du CCAG stipule, quant à lui, que l’entreprise dispose de 6 mois pour contester, le cas échéant, devant le juge la décision expresse de refus du maître d’ouvrage.

En l’espèce, dans le cadre de l’exécution d’un marché de travaux, l’entreprise titulaire a, par un courrier du 28 septembre 2012, indiqué au maître d’ouvrage que le « décompte général » reçu quelques jours plus tôt n’était pas conforme aux articles 13-41 et 13-42 du CCAG Travaux, notamment parce que le courrier ne comportait pas le détail du solde du marché. Par un courrier notifié à l’entreprise le 2 janvier 2013, le maître d’ouvrage a contesté ces griefs en renseignant à cette occasion le détail du solde du marché. Puis le maître d’ouvrage a notifié à l’entreprise un décompte général le 7 mai 2013.

Le pourvoi de l’entreprise titulaire reproche à la Cour administrative d’appel d’avoir déclaré forclose sa demande introduite auprès du Tribunal administratif le 13 octobre 2015. Le Conseil d’Etat valide le raisonnement de la Cour administrative d’appel en considérant que le délai prévu à l’article 50.32 du CCAG-Travaux avait bel et bien commencé à courir le 2 janvier 2013, date de notification du courrier du maître d’ouvrage à l’entreprise – et ce, en dépit de la notification ultérieure à l’entreprise d’un décompte, le 7 mai 2013.

Le Conseil d’Etat rappelle en effet que la mise en demeure adressée par l’entrepreneur au maître d’ouvrage de lui notifier un décompte général et définitif constitue un mémoire en réclamation au sens de l’article 50.22 du CCAG (v. par ex : CE 8 août 2008, Société Bleu Azur, req. n°290051, aux Tables), entraînant par là-même l’application de la procédure et des délais prévus aux articles 50.31 et 50.32 du CCAG. Par suite, si un décompte est notifié avant les trois mois prévus à l’article 50.31, il entraînera un non-lieu à statuer sur l’éventuelle demande qui aura été portée devant le Tribunal par l’entrepreneur, « alors même qu’antérieurement au jugement ce décompte a fait l’objet d’une réclamation qui a donné naissance à un litige distinct ». En revanche, « l’intervention du décompte général après l’expiration du délai de trois mois ne permet pas de prononcer le non-lieu à statuer, un tel document ne constituant pas un décompte général au sens des dispositions du [CCAG] » et n’a pas d’incidence sur le délai de forclusion prévu à l’article 50.32 qui aurait pu commencer à courir à la suite d’une décision expresse de rejet.

En l’espèce, selon le Conseil d’Etat, le courrier du 28 septembre 2012 devait être regardé comme une mise en demeure de l’entrepreneur de lui notifier un décompte général et donc comme un mémoire en réclamation au sens de l’article 50.22. Par ailleurs, le courrier notifié le 2 janvier 2013 par le maître d’ouvrage, en précisant l’état du solde du marché, a mis l’entreprise en mesure de connaître le différend financier existant entre elle et le maître d’ouvrage. Ce dernier courrier a donc eu pour effet de faire courir le délai de six mois prévu à l’article 50.32 du CCAG Travaux.

Les conclusions de l’entreprise sont donc irrecevables, entraînant par là l’irrecevabilité des conclusions reconventionnelles du maître d’ouvrage.

 

CE 31 octobre 2023, Société GTM Sud, req. n°467237

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