À la suite du renvoi par le Conseil d’État de la question prioritaire de constitutionnalité du paragraphe II de l’article L. 2113-5 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe), le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions non conformes à la Constitution dans une décision du 21 octobre dernier.
Pour rappel, ces dispositions imposent au conseil municipal d’une commune nouvelle issue de communes contiguës membres de plusieurs EPCI à fiscalité propre, de se prononcer sur l’EPCI dont elle souhaite devenir membre, dans le mois suivant sa création. Ces dispositions permettent également au Préfet, en cas de désaccord, de saisir la Commission départementale de coopération intercommunale d’un autre projet de rattachement. Et, à défaut d’accord sur le souhait de la commune à une majorité des deux tiers, la commune doit se rattacher à l’EPCI choisi par le Préfet.
Les deux communautés de communes requérantes soulevaient la méconnaissance, par ce mécanisme, du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.
Après avoir reconnu que les dispositions litigieuses affectaient bien la libre administration des communes concernées en ce qu’elles autorisaient le Préfet à imposer à la commune nouvelle un rattachement différent de celui qu’elle avait choisi, le Conseil constitutionnel a néanmoins considéré que le législateur avait poursuivi un but d’intérêt général en évitant que le choix de la commune nouvelle « puisse porter atteinte à la cohérence ou à la pertinence des périmètres intercommunaux existants ».
Le Conseil constitutionnel n’a pas limité son analyse aux conséquences de ce rattachement « forcé » sur la commune nouvelle, estimant, plus largement, que « le rattachement à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre a nécessairement des conséquences pour la commune nouvelle, pour les communes membres des établissements publics concernés et pour ces établissements publics eux-mêmes ».
À ce titre, il a ensuite observé que le mécanisme ne prévoyait la consultation ni de l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre auquel le rattachement est envisagé, ni des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre dont la commune nouvelle est susceptible de se retirer, ni des conseils municipaux des communes membres de ces EPCI à fiscalité propre.
En outre, le Conseil constitutionnel a indiqué que ni ces établissements publics, ni ces communes ne bénéficiaient, en cas de désaccord avec le projet de rattachement, d’une garantie similaire à celle de la commune nouvelle, qui peut voir son projet validé par un vote favorable des deux tiers de la CDCI.
Ces deux lacunes ont conduit le Conseil constitutionnel à conclure à la non-conformité de ces dispositions au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, en incluant les EPCI à fiscalité propre.
Par ailleurs, jugeant que l’abrogation immédiate de ces dispositions serait de nature à créer un vide juridique quant à la détermination de l’EPCI à fiscalité propre de rattachement de la commune nouvelle issue de la fusion de communes membres d’EPCI à fiscalité propre différents, le Conseil a reporté l’abrogation des dispositions concernées au 31 mars 2017, tel que l’y autorise l’article 62 de la Constitution. Et, les sénateurs, prenant acte de cette décision, ont introduit, en première lecture et dans le cadre de la loi tendant à faciliter la mise en place et le fonctionnement des intercommunalités, un amendement proposant une nouvelle procédure de rattachement. L’Assemblée Nationale devra à présent se prononcer sur cette proposition.
Dans l’intervalle, le Conseil constitutionnel a prévu un mécanisme intermédiaire dans le cadre des instances en cours ou à venir. Il a ainsi précisé qu’en cas d’annulation, par le Juge administratif, de l’arrêté préfectoral prononçant le rattachement de la commune nouvelle à un EPCI à fiscalité propre, la commune nouvelle reste membre des établissements publics auxquels appartenaient ses communes d’origine jusqu’à l’entrée en vigueur du nouvel arrêté préfectoral, par exception à la règle qui interdit à une commune d’appartenir à plusieurs EPCI à fiscalité propre.
Références