Par une décision du 4 avril 2025, le Conseil d’Etat reconnait que l’organe délibérant d’une collectivité territoriale peut formuler des vœux, prises de position ou déclarations d’intention, même à caractère politique, dès lors qu’ils présentent un intérêt public local.
Par une délibération du 11 juin 2020, le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a adopté un vœu adressé au gouvernement, exprimant plusieurs souhaits relatifs à l’organisation, aux moyens et au fonctionnement de la police nationale, en particulier dans le département. Le préfet de la Seine-Saint-Denis a déféré cette délibération devant le tribunal administratif, estimant qu’elle excédait les compétences du département. Ce recours a été rejeté en première instance. La cour administrative d’appel de Paris a toutefois censuré ce jugement en estimant que la délibération ne relevait pas des compétences du département.
Saisi en cassation, le Conseil d’Etat relève, d’abord, que : « L’article 58 de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions a abrogé les dispositions de l’article L. 121-29 du code des communes interdisant aux conseils municipaux d’émettre des vœux politiques et celles du troisième alinéa de l’article 51 de la loi du 10 août 1871 relative aux conseils généraux interdisant à ces derniers d’émettre des vœux politiques et ne leur reconnaissant, explicitement, que la possibilité d’émettre des vœux sur toutes les questions économiques et d’administration générale. Ce faisant, le législateur doit être regardé comme ayant, implicitement mais nécessairement, reconnu la faculté, pour les organes délibérants des collectivités territoriales, de formuler des vœux, des prises de position ou des déclarations d’intention, y compris de nature politique, sans la restreindre aux domaines de compétence que la loi leur attribue, pourvu qu’ils portent sur des objets présentant un intérêt public local ». La Haute Juridiction ajoute également que les dispositions de la loi NOTRe du 7 août 2015, qui limitent la compétence des départements aux seuls domaines expressément attribués par la loi, est sans incidence à cet égard.
Censurant l’arrêt de la cour administrative d’appel, le Conseil d’Etat décide de statuer sur l’affaire au fond et de rejeter les moyens du préfet en jugeant, d’une part, que la délibération attaquée ne porte pas atteinte au principe de neutralité, dès lors que le législateur a admis que les collectivités puissent formuler des vœux à caractère politique et, d’autre part, que les questions relatives à l’organisation, aux moyens et au fonctionnement de la police nationale dans le département présentent bien un intérêt public local.
CE, 4 avril 2025, Département de la Seine-Saint-Denis, req. n° 472245