Par une décision du 28 décembre 2017, le Conseil d’Etat rappelle que la jurisprudence relative à l’ensemble immobilier unique ne trouve à s’appliquer que lorsque les constructions qui font l’objet de demandes d’autorisations distinctes présentent des éléments unis par des liens physiques ou fonctionnels tout en jugeant à cet égard que le seul fait pour les constructions de partager une servitude de cour commune ne peut suffire à caractériser de tels liens.
Pour rappel, la jurisprudence relative à « l’ensemble immobilier unique » (voir CE Sect. 17 juillet 2009, Commune de Grenoble et Communauté d’agglomération Grenoble Alpes métropole, req. n° 301615, Rec. p. 270) pose le principe selon lequel l’examen des demandes d’autorisations de construire portant sur des éléments distincts d’un ensemble immobilier unique – qui entretiennent donc entre eux des liens physiques et fonctionnels – peut, par exception, aboutir à la délivrance d’autorisations distinctes :
- à la condition que l’ampleur et la complexité du projet justifient que des éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome puissent faire l’objet de permis distincts ;
- et sous réserve que l’autorité administrative soit en mesure de vérifier, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l’ensemble des permis délivrés.
Dans la présente décision, qui sera mentionnée aux Tables, le Conseil d’Etat a rappelé la jurisprudence précitée en ajoutant que « des constructions distinctes, ne comportant pas de liens physiques ou fonctionnels entre elles, n’ont pas à faire l’objet d’un permis unique, mais peuvent faire l’objet d’autorisations distinctes, dont la conformité aux règles d’urbanisme est appréciée par l’autorité administrative pour chaque projet pris indépendamment ». Autrement dit, des constructions qui, en raison de l’absence de liens physiques ou fonctionnels entre elles, sont insusceptibles d’être qualifiées d’ensemble immobilier unique, peuvent par principe faire l’objet d’autorisations distinctes sans être tenues de respecter les conditions précitées.
En l’espèce, le Conseil d’Etat constate que si les deux constructions en cause dans l’affaire se situaient à l’origine sur le même terrain, celui-ci avait fait l’objet d’une division foncière à la suite de laquelle chaque nouvelle parcelle avait vocation à accueillir un projet distinct, faisant intervenir un maître d’ouvrage différent : pour l’une, la réhabilitation de l’immeuble de bureaux existant et, pour l’autre, la construction d’un nouveau bâtiment, physiquement distinct de l’immeuble existant et destiné à accueillir des logements sociaux.
Le Conseil d’État exclut alors la qualification d’ensemble immobilier unique en indiquant à cet égard que la seule institution d’une servitude de cour commune entre les deux constructions ne peut suffire à caractériser un lien physique ou fonctionnel permettant une telle qualification. Il en tire la conclusion que « la conformité de chacun de ces deux projets distincts aux règles d’urbanisme devait, ainsi qu’il a été dit précédemment, être appréciée par l’autorité administrative pour chaque projet pris indépendamment ».