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Précisions sur le contrôle de l’utilité publique d’un projet par le juge de l’expropriation

29 juillet 2016

Par une décision du 6 juillet 2016, le Conseil d’État précise la nature du contrôle opéré par le juge de l’expropriation sur l’utilité publique d’une opération.

Dans cette affaire, le Préfet des Yvelines a déclaré d’utilité publique le projet de zone d’aménagement concerté « Cœur de Ville », situé sur le territoire de la commune d’Achères, et autorisé l’aménageur à procéder à l’acquisition, par voie d’expropriation, de plusieurs immeubles situés dans le périmètre de la ZAC.

Les propriétaires d’un immeuble commercial, concernés par la procédure d’expropriation, ont formé un recours pour excès de pouvoir contre l’arrêté préfectoral déclarant l’utilité publique du projet, mais leur demande a été rejetée en première instance.

Les requérants ont toutefois obtenu gain de cause en appel puisque la Cour administrative d’appel de Versailles a prononcé l’annulation de l’arrêté litigieux, au motif « que l’opération d’aménagement du centre-ville d’Achères pouvait être réalisée de façon équivalente sans expropriation de la parcelle appartenant [aux requérants] ». Selon la Cour, « la présence de l’immeuble à vocation commerciale implanté sur cette parcelle ne portait pas atteinte aux objectifs de la ZAC ».

Saisi d’un pourvoi formé par la commune d’Achères et l’aménageur, le Conseil d’État censure la décision de la CAA de Versailles et précise le degré de contrôle opéré par le juge de l’expropriation chargé d’apprécier l’utilité publique d’un projet.

Rappelons « qu’il appartient au juge [de l’expropriation], lorsqu’il doit se prononcer sur le caractère d’utilité publique d’une opération nécessitant l’expropriation d’immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu’elle répond à une finalité d’intérêt général, que l’expropriant n’était pas en mesure de réaliser l’opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l’expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d’ordre social ou économique que comporte l’opération ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente » (CE 19 octobre 2012, Commune de Levallois-Perret, req. n° 371034). En somme, le juge exerce un contrôle en trois temps : finalité d’intérêt général, nécessité d’exproprier, bilan coûts-avantages.

Précisant la deuxième étape du raisonnement, le Conseil d’État estime que la juridiction d’appel a exercé un contrôle trop approfondi, qui dépassait le simple contrôle de la nécessité d’exproprier. En effet, « en recherchant si les objectifs de la ZAC pouvaient être atteints dans le cadre d’un projet ne comprenant pas [la parcelle litigieuse], au lieu de se borner à s’assurer que l’inclusion de cette parcelle dans le périmètre d’expropriation n’était pas sans rapport avec l’opération d’aménagement déclarée d’utilité publique, la Cour a commis une erreur de droit ».

Concrètement, s’il appartient au juge de vérifier que le recours à l’expropriation est nécessaire, faute d’instrument juridique permettant de réaliser le projet dans des conditions équivalentes, il ne saurait toutefois contrôler la pertinence d’inclure une parcelle dans le périmètre d’expropriation, au regard des objectifs visés par la ZAC.

Références

CE 6 juillet 2016, Commune d’Achères et SARRY 78, req. n° 371034 – Sera mentionné aux tables

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