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Procédure disciplinaire : précisions concernant l’anonymisation des témoignages communiqués à l’agent poursuivi

16 janvier 2024

Par une décision du 22 décembre 2023 qui sera publiée au recueil Lebon, la Section du contentieux du Conseil d’Etat a décidé de ne plus limiter la possibilité d’anonymisation des témoignages communiqués à l’agent poursuivi à ceux étant « de nature à porter gravement préjudice » à leur auteur mais de l’étendre à tous ceux présentant un « risque avéré de préjudice » à leur auteur.

 

Contraint de ménager les deux grands principes que sont le respect des droits de la défense d’un côté, et la protection des témoins de l’autre, le Conseil d’Etat avait décidé, à l’occasion d’une décision du 5 février 2020 (req. n° 433130, publiée au Recueil), confirmée par une décision du 28 avril 2023 (req. n° 443749, mentionnée aux Tables), que lorsqu’une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d’un agent public, le rapport établi à l’issue de cette enquête et, le cas échéant, les procès-verbaux d’auditions des personnes entendues sur le comportement de l’agent objet de l’enquête devaient être communiqués à ce dernier, « sauf si la communication de ces procès-verbaux serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné ».

Cependant, comme le souligne la rapporteure publique ayant conclu à l’occasion de la décision de Section commentée, Madame Dorothée PRADINES, cette solution a fait l’objet de très vives critiques en raison des très faibles opportunités laissées à l’anonymisation (seulement en cas de risque de grave préjudice), ce qui plaçait les témoins en position de vulnérabilité car susceptibles de subir des représailles en raison de leurs témoignages.

Par la décision du 22 décembre 2023, le Conseil réuni en Section a fait le choix de suivre sa rapporteure publique en supprimant la condition de gravité du préjudice risquant d’être subi par les personnes ayant témoigné, ne retenant plus qu’un « risque avéré de préjudice », et élargissant ainsi de facto les possibilités d’anonymisation des témoignages sans risquer une annulation contentieuse pour violation des droits de la défense. La décision fournit également une précision quant à l’appréciation de ce risque avéré de préjudice, puisqu’elle précise que l’administration doit « apprécie[r] ce risque au regard de la situation particulière du témoin vis-à-vis de l’agent public mis en cause, sans préjudice de la protection accordée à certaines catégories de témoins par la loi ». On précisera enfin que la rapporteure publique proposait quant à elle de retenir une « quasi-présomption » de risque avéré « lorsque le témoin est placé sous l’autorité hiérarchique directe de l’agent en cause ».

CE, Section, 22 décembre 2023, req. n° 462455, publié au Recueil

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