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Réclamation sur le décompte général et responsabilité du maître d’ouvrage

15 mai 2024

Par une décision du 10 avril 2024, le Conseil d’Etat vient rappeler, d’une part, que dans le cadre d’un contentieux portant sur l’exécution financière d’un marché public, le juge doit exercer un contrôle restreint à l’erreur manifeste d’appréciation sur l’examen que le maître d’ouvrage a opéré sur les capacités du titulaire du marché ; et d’autre part, que le juge doit établir un lien de causalité entre la faute du maître d’ouvrage et le préjudice allégué par l’entreprise qui formule des demandes indemnitaires.

En l’espèce, une commune a lancé un marché de travaux portant sur l’extension d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes divisé en plusieurs lots. A l’occasion du règlement financier du marché, l’entreprise titulaire du lot « voiries réseaux divers » a refusé de signer le décompte général qui lui a été notifié et a retourné au maître d’ouvrage un mémoire en réclamation. Le maître d’ouvrage a implicitement rejeté la demande de paiement complémentaire et l’entreprise a saisi le tribunal administratif qui a partiellement fait droit aux demandes de l’entreprise en condamnant le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre et le titulaire du lot gros-œuvre. L’ensemble des parties à l’instance a fait appel du jugement et la cour administrative d’appel a mis hors de cause le maître d’œuvre, tout en confirmant la responsabilité du maître d’ouvrage. Dans ce cadre, la commune a formé un recours en cassation.

Pour condamner le maître d’ouvrage, les juges d’appel ont estimé qu’il avait commis une faute en raison du choix de l’attributaire du lot gros-œuvre qui, selon l’entreprise requérante, ne disposait pas des capacités financières, techniques et professionnelles requises pour exécuter le contrat.

Le Conseil d’Etat a estimé que la cour avait commis deux erreurs de droit. D’une part, il rappelle qu’au stade de l’exécution du contrat, le contrôle du juge sur l’examen des capacités des entreprises titulaires pour exécuter le marché est un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation. Ce faisant, le Conseil d’Etat rappelle qu’il doit s’agir d’un contrôle distancié et le rapporteur public, Nicolas Labrune, semble indiquer dans ses conclusions que la faute de la commune ne lui paraissait pas caractérisée à la lecture de l’arrêt d’appel. D’autre part, il apparaît que les juges d’appel n’ont pas vérifié l’existence d’un lien de causalité entre le préjudice allégué, tiré de l’allongement de la durée de chantier et les fautes imputées au maître d’ouvrage.

L’arrêt de la cour est donc partiellement annulé et le Conseil d’Etat a renvoyé l’affaire au fond pour qu’elle soit rejugée dans cette mesure.

CE 10 avril 2024, Commune de Gignac, req. n° 482722

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