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Revirement de jurisprudence relatif à l’acquisition des congés payés

10 octobre 2023

Par une série d’arrêts rendus en formation plénière le 13 septembre 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation écarte certaines dispositions du droit français non conformes au droit européen, qui excluaient ou limitaient l’acquisition des congés pour les salariés en arrêt maladie.

 

Dans la première affaire (n°22-17.340), était évoquée la question de l’acquisition des congés pendant un arrêt de travail pour maladie. Le code du travail prévoit que les périodes d’arrêt pour maladie non professionnelle ne sont pas considérées comme périodes de travail effectif et ne sont pas prises en compte, sauf disposition conventionnelle contraire, pour la détermination de la durée du congé (article L. 3141-5 du code du travail). Or, sur ce point, la CJUE considère que le droit à congé payé annuel « ne peut pas être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État » (CJCE, 20 janvier 2009, nº C-350/06 ; CJUE, 24 janvier 2012, nº C-282/10). Cette directive étant dépourvue d’effet direct horizontal, le droit français demeurait pleinement opposable aux salariés (Cass. soc., 13 mars 2013, nº 11-22.285). Une nouvelle jurisprudence européenne est toutefois venue reconnaître un effet direct horizontal à l’article 31 2 de la Charte des droits fondamentaux qui reconnaît un droit à une période annuelle de congés payés à tous travailleurs (CJUE, 6 novembre 2018, nº C-619/16). C’est précisément la logique retenue par la Cour de cassation dans ses arrêts du 13 septembre : invoquant l’article 31 2 de la Charte, la Haute juridiction juge qu’il convient, désormais, d’écarter les dispositions du droit français qui ne sont pas conformes au droit de l’Union et de considérer que les salariés dont le contrat de travail est suspendu en raison d’un arrêt de travail pour maladie d’origine non professionnelle acquièrent malgré tout des droits à congés payés durant cette période.

La seconde affaire (22-17.340) portait sur l’acquisition des congés payés en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. La limite de 12 mois pour le calcul des droits à congés payés par le droit français est écartée sur les mêmes fondements par la Cour de cassation.

Une troisième affaire (n°22-10.529) portait sur le point de départ du délai de prescription de l’indemnité de congés payés en cas de litige. Tandis qu’il était admis que le point de départ de ce délai était fixé à l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris, la Cour de cassation a décidé, là encore et eu égard au droit de l’Union européenne, que le point de départ de la prescription de l’indemnité de congé payé ne peut commencer à courir que si l’employeur a pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement son droit à congés payés.

Cette mise en conformité du droit français vis-à-vis du droit de l’Union européenne remet en cause la gestion des congés payés pour les employeurs, les gestionnaires de paie, de ressources humaines ou juristes, d’autant plus que ces décisions ont une portée rétroactive.

Cass. Soc. 13 sept. 2013, n°22-17.340, 22.17-638, 22-10.529

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