Temps de travail et temps de repos sous astreinte : précisions de la CJUE
Par deux arrêts du 9 mars 2021, la Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée sur la distinction entre temps de repos et temps de travail en période d’astreinte, au sens de la directive 2003/88 du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail.
En premier lieu, la Cour rappelle que les notions de temps de travail et de temps de repos, exclusives l’une de l’autre, doivent faire l’objet d’une interprétation autonome de nature à assurer à la directive sa pleine efficacité ainsi que son application uniforme dans l’ensemble des États membres. Ces notions ne peuvent donc pas être déterminées unilatéralement par ces derniers, le droit reconnu aux travailleurs par la directive 2003/88 à ce que les périodes de travail soient dûment prise en compte ne pouvant faire l’objet d’aucune restriction.
En second lieu, la Cour définit ces deux notions. Ainsi, relève de la notion de temps de travail, « l’intégralité des périodes de garde, y compris celles sous régime d’astreinte, au cours desquelles les contraintes imposées au travailleur sont d’une nature telle qu’elles affectent objectivement et très significativement la faculté, pour ce dernier, de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres intérêts. Inversement, lorsque les contraintes imposées au travailleur au cours d’une période de garde déterminée n’atteignent pas un tel degré d’intensité et lui permettent de gérer son temps et de se consacrer à ses propres intérêts sans contraintes majeures, seul le temps lié à la prestation de travail qui est, le cas échéant, effectivement réalisée au cours d’une telle période constitue du “temps de travail“, aux fins de l’application de la directive2003/88 ».
La Cour, a par ailleurs précisé, que seules les contraintes qui sont imposées au travailleur, que ce soit par la réglementation de l’État membre concerné, par une convention collective ou par son employeur, en vertu, notamment, du contrat de travail, du règlement de travail ou du système de répartition des services de garde entre travailleurs, peuvent être prises en considération afin d’évaluer si une période de garde constitue du temps de travail, au sens de la directive 2003/88.
En revanche, les difficultés organisationnelles qu’une période de garde peut engendrer pour le travailleur et qui ne découlent pas de telles contraintes, mais qui sont, par exemple, la conséquence d’éléments naturels ou du libre choix de celui-ci ne sauraient être prises en compte. C’est ainsi qu’à titre illustratif – et pour répondre aux questions préjudicielles qui lui étaient posées -, la Cour a indiqué que la distance séparant le domicile librement choisi par le travailleur de l’endroit qu’il doit être en mesure de rejoindre dans un certain délai au cours de sa période de garde sous astreinte n’est pas, en tant que telle, un critère pertinent pour qualifier l’intégralité de cette période de « temps de travail ».
CJUE, n° C-344/19, Arrêt de la Cour, D. J. contre Radiotelevizija Slovenija, 9 mars 2021
CJUE, n° C-580/19, Arrêt de la Cour, RJ contre Stadt Offenbach am Main, 9 mars 2021