Dans une intéressante affaire portant sur le sort des biens affectés au réseau de chauffage urbain de La Défense, le Conseil d’État apporte une précision à sa décision d’Assemblée Commune de Douai (CE Ass. 21 décembre 2012, req. n° 342788).
Dans cette affaire, une partie des ouvrages concédés avait été détruite par une explosion accidentelle. Les progrès de la technologie ont fait qu’il n’était plus nécessaire de reconstruire à l’identique les installations pour produire la quantité de chaleur produite auparavant. Le délégataire soutenait donc que ces ouvrages n’étaient plus nécessaires au service, de sorte qu’ils ne devaient pas faire retour à l’autorité délégante ; raisonnement suivi par la Cour administrative d’appel de Paris.
Le Conseil d’État annule cette décision d’appel et complète son considérant de principe dans les termes suivants : « 4. Considérant que, dans le cadre d’une délégation de service public ou d’une concession de travaux mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l’acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l’ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique ; qu’à l’expiration de la convention, les biens qui sont entrés, en application des principes énoncés ci-dessus, dans la propriété de la personne publique et ont été amortis au cours de l’exécution du contrat font nécessairement retour à celle-ci gratuitement, sous réserve des clauses contractuelles permettant à la personne publique, dans les conditions qu’elle détermine, de faire reprendre par son cocontractant les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public ; que, par suite, en l’absence de telles clauses, ces biens, qui ont été nécessaires au fonctionnement du service concédé à un moment quelconque de l’exécution de la convention, font retour à la personne publique à l’expiration de celle-ci, quand bien même ils ne sont plus alors nécessaires au fonctionnement du service public concédé ».
En conséquence, la qualification du bien de retour ne s’apprécie pas à l’expiration du contrat : tout bien qui, au cours de la délégation, a été nécessaire au fonctionnement du service, appartient à l’autorité délégante et doit obligatoirement lui faire retour.
En complément, on peut retenir de cette décision que :
- les clauses contractuelles par lesquelles les parties décideraient de classer dans la catégorie des biens de reprise des biens nécessaires au service et qui devraient donc être des biens de retour, ne peuvent, semble-t-il, porter que sur les seuls biens « qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public», à l’exclusion des biens qui seraient, objectivement, encore nécessaires à ce service (les parties ne pouvant donc pas déroger aux principes généraux) ;
- le terrain, propriété du délégataire, sur lequel est construit un ouvrage assimilable à un bien de retour constitue lui-même un bien de retour devant faire retour, en principe gratuitement, à l’autorité délégante.
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