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Validation des clauses d’interprétariat par le Conseil d’Etat

08 janvier 2018

Par un arrêt rendu 4 décembre 2017, mentionné aux Tables, le Conseil d’Etat, aux conclusions contraires de son rapporteur public Gilles Pellissier, a admis la légalité des clauses d’interprétariat, en rejetant le pourvoi formé par le ministre de l’Intérieur, tout en conditionnant leur validité.

La Région Pays de la Loire a, par un avis d’appel public à la concurrence en vue de la passation d’un marché public de travaux de mise en accessibilité handicaps et de réfection des cours du lycée Ambroise Paré à Laval. Avant la date limite de remise des offres, le préfet de la Région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, d’annuler cette procédure de passation, de supprimer les « clauses d’interprétariat » introduites dans les pièces de ce marché, en particulier les articles 8 et 12 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), enfin, d’enjoindre à la région Pays de la Loire de reprendre la procédure de passation à ses débuts. Par une ordonnance du 10 juillet 2017, contre laquelle le ministre de l’intérieur se pourvoit en cassation, le juge du référé précontractuel a rejeté la demande du préfet.

Le Conseil d’Etat rappelle d’abord, « qu’un pouvoir adjudicateur peut imposer, parmi les conditions d’exécution d’un marché public, des exigences particulières pour prendre en compte des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, à l’environnement, au domaine social ou à l’emploi, sous réserve que celles-ci présentent un lien suffisant avec l’objet du marché [v. article 38-I. de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics] ; qu’une mesure nationale qui restreint l’exercice des libertés fondamentales garanties par le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ne peut être admise qu’à la condition qu’elle poursuive un objectif d’intérêt général, qu’elle soit propre à garantir la réalisation de celui-ci et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ; qu’il suit de là que, lorsqu’elles sont susceptibles de restreindre l’exercice effectif des libertés fondamentales garanties par ce traité, les exigences particulières imposées par le pouvoir adjudicateur doivent remplir les conditions qui viennent d’être rappelées ».

En l’espèce, le Conseil d’Etat considère que les clauses d’interprétariat présentent un lien suffisant avec l’objet du marché, qu’elles ne sont pas discriminatoires ni ne constituent une entrave à la libre circulation car elles s’appliquent « indistinctement à toute entreprise quelle que soit sa nationalité » ; en outre, « nécessairement appliquée de manière raisonnable par le maître d’ouvrage pour ne pas occasionner de coûts excessifs au titulaire du marché, [cette clause] vise à permettre au maître d’ouvrage de s’assurer, en vertu notamment de l’article L. 4531-1 du code du travail cité (…), que chaque travailleur directement concerné par l’exécution de tâches risquées sur le chantier est en mesure de réaliser celles-ci dans des conditions de sécurité suffisantes ; que, compte tenu du degré de risque particulièrement élevé à cet égard dans les chantiers de travaux et dans la mesure où le recours à une personne susceptible d’assurer l’information appropriée aux travailleurs dans leur langue ne concerne que ceux directement concernés par l’exécution de ces tâches, le juge des référés n’a pas entaché son ordonnance d’erreur de droit ni d’inexacte qualification juridique en jugeant que cette clause, à supposer même qu’elle puisse être susceptible de restreindre l’exercice effectif d’une liberté fondamentale garantie par le droit de l’Union, poursuit un objectif d’intérêt général dont elle garantit la réalisation sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ».

CE 4 décembre 2017, Ministre de l’Intérieur, req. n°413366, mentionné aux Tables

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